Les éditions Argyll publient ce 23 août 2024 la première traduction en Français de l'auteur culte espagnol Rafael Marin, La Geste d'Hamlet Evans. Ce grand space opera est, au royaume de Don Quichotte, considéré comme une pièce maîtresse de la science-fiction espagnole. Argyll est très fier de le publier, dans une traduction signée Sylvie Miller, spécialiste de l'imaginaire venu d'Espagne et d'Amérique latine. Nous vous proposons, pour cette sortie, une courte interview de l'auteur (et nous partageons également la version espagnole).
Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs français ?
Je suis une sorte d’homme-orchestre multi-casquettes : professeur, auteur de bande dessinée, traducteur, écrivain, conférencier, directeur de publications. J’écris parce que je ne peux pas m’empêcher d’écrire et parce que j’aime expérimenter le langage et de nombreuses thématiques.
Quel a été le déclencheur de votre roman, La Geste d’Hamlet Evans ?
À l’époque, j’étais jeune et audacieux. J’étudiais à l’université la littérature du Moyen Âge et m’est alors venue l’idée de transférer l’esthétique des ménestrels et des croisades vers le space-opera. Cela a donné un roman picaresque sans voyous, un western crépusculaire et, aussi, un livre anti-guerre.
Comment a-t-il été accueilli en Espagne ?
Le roman est d’abord passé inaperçu : il a dû faire face à des problèmes de distribution et sa parution a coïncidé avec un moment où la science-fiction n’avait plus la côte auprès des éditeurs. Heureusement, avec le temps, il est devenu un classique et a connu plusieurs éditions. Certains disent qu’il s’agit du meilleur roman de science-fiction espagnole, je ne me battrai pas contre cette idée 🙂
Le roman est très politique mais aussi très imaginatif. Est-il difficile de concilier romance et politique ?
C’est un roman rempli d’amertume. Quand j’en ai commencé la rédaction, alors que eje n’avais que quelques pages, le coup d’État du lieutenant-colonel Tejero de la Guardia Civil a eu lieu. Il ne pouvait donc qu’être amer et politique, parce que ce furent des années difficiles. Le mélange des situations et des genres (il y a du lyrisme, de l’aventure, des accents de western, beaucoup d’amour aussi pour le space opera et la littérature) en ont fait un roman original.
Comment se porte la science-fiction en Espagne ? Y a-t-il une communauté et de grands auteurs à suivre ?
En Espagne, la science-fiction connaît traditionnellement des hauts et des bas tous les cinq ou dix ans. Les grands éditeurs ne misent pas du tout sur les romans (ni les nouvelles), et ce sont donc les petits éditeurs qui publient, pour beaucoup, les auteurs débutants. Le fandom a aussi beaucoup évolué ces dernières années, il est beaucoup plus jeune. Ainsi, beaucoup de lecteurs, qui veulent aussi devenir auteurs, ignorent désormais complètement le travail de Domingo Santos, Ángel Torres Quesada, Rodolfo Martínez, Juan Miguel Aguilera ou Elia Barceló, qui sont les « classiques ».
Quels sont vos thèmes principaux lorsque vous écrivez de la science-fiction et que pouvez-vous nous en dire ?
L’individu contre la société. L’âme contre la machine. La rébellion mais aussi l’amertume de ne pas pouvoir vaincre ce qui était établi. Même quand je n’écris pas de science-fiction (je suis aussi l’auteur de romans historiques, policiers et jeunesse), j’écris toujours comme s’il s’agissait de science-fiction. Les thèmes sont les mêmes, la seule chose qui change, c’est le cadre. Ma force, dit-on, ce sont les personnages.
Si vous vouliez convaincre les lecteurs français de lire La Geste d’Hamlet Evans, que leur diriez-vous ?
C’est un roman où l’aspect littéraire a son poids. Il s’agit d’une aventure mais aussi d’une vraie réflexion. Il a souvent été dit que la construction du personnage d’Hamlet Evans est excellente, et c’est pourquoi tant de lecteurs s’identifient à ce poète persécuté. Parce qu’il refuse de se soumettre à l’empire que représente la Corporation. On pourrait dire qu’il est une sorte de François Villon dans l’espace.
ARGYLL et Rafael Marin, 2024.
Traduction de l’interview : Xavier Dollo
¿Puedes presentarte a los lectores franceses?
Soy un especie de hombre-orquesta que hace muchas cosas: profesor, guionista de cómics, traductor, escritor, conferenciante, director de publicaciones. Escribo porque no puedo no escribir, porque me gusta experimentar con las temáticas y el lenguaje.
¿Cuál fue el detonante de tu novela, Lágrimas de luz?
Yo era muy joven y muy osado. Estaba en la universidad estudiando la literatura de la Edad Media y se me ocurrió trasladar la estética de los juglares y las cruzadas a la space-opera. Acabó siendo una novela picaresca sin pícaro, un western crepuscular, un libro antibélico.
¿Cómo fue recibido en España?
Al principio pasó desapercibida: hubo problemas de distribución y coincidió con uno de los momentos en que la ciencia ficción casi desapareció de las editoriales. Por suerte, con el paso del tiempo se ha convertido en un clásico y lleva varias ediciones. Dicen que es la mejor novela de la ciencia ficción española, así que no lo negaré 🙂
La novela es muy política pero también muy imaginativa. ¿Es difícil equilibrar el romance y la política?
Es una novela muy amarga. Empecé a escribirla y llevaba pocas páginas cuando se intentó el golpe de estado del teniente coronel Tejero de la Guardia Civil. Tenía que ser política y tenía que ser amarga porque fueron años difíciles. La mezcla de situaciones y géneros (hay lirismo, hay aventura, hay reminiscencias del western, hay mucho amor por la space opera y por la literatura) hizo que fuera una novela original.
¿Cómo va la ciencia ficción en España? ¿Existe una comunidad y grandes autores a los que seguir?
En España, la ciencia ficción tiene altibajos que se producen cada cinco o cada diez años. Las grandes editoriales no apuestan por las novelas (ni los relatos), así que son las pequeñas editoriales las que publican, y mucho, a autores que empiezan. El fandom también ha cambiado mucho en estos años, es mucho más joven que cuando yo era joven, así que muchos lectores-que-quieren-ser-autores desconocen la obra de autores y autoras como Domingo Santos, Ángel Torres Quesada, Rodolfo Martínez, Juan Miguel Aguilera o Elia Barceló, que son los “clásicos”.
¿Cuáles son tus temas principales cuando escribes ciencia ficción y qué nos puedes contar sobre ellos?
El individuo contra la sociedad. El alma contra la máquina. La rebeldía pero también la amargura de no poder derrotar lo establecido. Incluso cuando no escribo ciencia ficción (he escrito novela histórica, policíaca, juvenil) sigo escribiendo como si fuera ciencia ficción. Los temas son los mismos, lo que cambia es el marco. Mi fuerte, dicen, son los personajes.
Si quisieras convencer a los lectores franceses de que leyeran Lágrimas de luz, ¿qué les dirías?
Es una novela donde lo literario tiene su peso. Es aventura pero también reflexión. La construcción del personaje, Hamlet Evans, dicen que es lo mejor, y por eso tanta gente se siente identificada con este poeta que es perseguido porque no se quiere someter al imperio que representa la Corporación. Podríamos decir que es François Villon en el espacio.
Rafael Marin / Argyll, 2024